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21 décembre 2016

Exposition au Louvre-Lens "L'histoire commence en Mésopotamie"

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Article dans "La Croix":

Les trésors de la Mésopotamie au Louvre-Lens 

Le Louvre-Lens consacre une exposition, à la fois belle et pédagogique, à cette fascinante contrée, où l’écriture, le tissage et la roue furent inventés.

Panneau de briques ornant la voie processionnelle de Babylone durant le règne de Nabuchodonosor II (605-562 avant J.-C.).

Panneau de briques ornant la voie processionnelle de Babylone durant le règne de Nabuchodonosor II (605-562 avant J.-C.). / RMN-Grand Palais (Le Louvre)/S.Olivier

Née entre le Tigre et l’Euphrate, la Mésopotamie tient son nom des Grecs qui l’avaient appelée le « pays entre deux fleuves ». Cette civilisation a rayonné pendant trois mille ans jusqu’à la conquête d’Alexandre le Grand, en 331 avant J.C. Tombée progressivement dans l’oubli, elle fut redécouverte au XIXe siècle par les archéologues et les érudits.

Un patrimoine menacé

En raison de leur stature monumentale, les célèbres taureaux ailés n’ont pas pu faire le déplacement jusqu’à Lens, de même que les trésors du Musée de Bagdad, rouvert depuis un an et demi. En Irak, toute sortie d’objets de valeur reste impossible : les pillages sont légion et les combats contre Daech font encore rage. L’ancienne cité de Nimroud, près de Mossoul, vient d’être libérée, il y a quelques semaines à peine, et la Ziggurat, sa colossale tour à étages, a malheureusement été rasée.

L’exposition évoque par petites touches les menaces qui planent sur ce patrimoine, comme sur cette image satellite du site de Khorsabad percé de dizaines de trous par les pilleurs (1). Le parcours, coloré par les magnifiques relevés de bas-reliefs réalisés lors des fouilles au XIXe siècle, insiste surtout sur l’importance et la richesse de cette civilisation souvent mal connue.

Figurine du démon Pazuzu, vers 934-610 av. J.-C. / RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/T.Ollivier

Figurine du démon Pazuzu, vers 934-610 av. J.-C. / RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/T.Ollivier

La Mésopotamie, « le monde des premières fois »

La commissaire Ariane Thomas parvient à rendre lisible les 400 objets venus du Louvre, du British Museum et du Vorderasiatisches Museum de Berlin, à travers un dispositif varié de cartes, de frises chronologiques, de maquettes et de films.

Ici, on chemine dans le palais disparu de Khorsabad et dans ses luxuriants jardins reconstitués en 3D. Là, on s’initie aux bases de l’écriture cunéiforme dont les signes sont poinçonnés dans l’argile fraîche à l’aide d’un roseau biseauté. On peut également écouter les sonorités rugueuses de la langue ou lire sur iPad les traductions des nombreux mythes inscrits sur les tablettes, comme ce récit du Déluge, comparable à celui de la Bible mais rédigé des siècles auparavant.

Pour Ariane Thomas, la Mésopotamie fut le « monde des premières fois ». Non seulement ce peuple fut le premier à écrire son histoire, via des chroniques royales fort détaillées, mais on lui doit aussi de nombreuses inventions : l’irrigation, la roue, la brique moulée, le verre, les produits laitiers, le vin et même la bière, que les notables buvaient à l’aide d’une paille recouverte d’or et de lapis-lazuli !

Statuette féminine dite Dame à l’aryballe, Mésopotamie. / Musée du Louvre/RMN-Grand Palais/Thierry Ollivier

Statuette féminine dite Dame à l’aryballe, Mésopotamie. / Musée du Louvre/RMN-Grand Palais/Thierry Ollivier

Les statuettes finement ciselées et les somptueuses parures féminines témoignent du raffinement de ces élites lettrées, férues de médecine et d’astronomie. Et cette civilisation brillante n’a pas livré tous ses mystères : plusieurs grandes cités antiques, comme celle d’Akkad, n’ont pas encore été retrouvées.

Mythes et fantasmes à foison

Depuis le XIXe siècle, la Mésopotamie a inspiré nombre de créations plus ou moins fantaisistes, dont une projection d’images en préambule du parcours donne un aperçu bigarré. Delacroix a peint magistralement la mort tragique de Sardanapale, mis en musique par Berlioz. Sémiramis, légendaire reine de Babylone, a inspiré à Voltaire une pièce et à Rossini un opéra. En 1842, c’est « Nabucco » (contraction de Nabuchodonosor, roi de Babylone), présenté à la Scala de Milan, qui a lancé la carrière de Verdi ! À New York, des taureaux ailés flamboyants ornent la façade d’un gratte-ciel, le Fred F. French building. L’assyriomanie a même gagné la bande dessinée, de Tintin à Adèle Blanc-Sec !

Article du Monde

A l’heure où l’étau se resserre sur Mossoul, la deuxième ville d’Irak, pour en déloger les djihadistes de l’organisation Etat islamique (EI), le Louvre-Lens (Pas-de-Calais) raconte en quatre cents objets ce que l’on doit à la Mésopotamie – l’actuel Irak avec la frange orientale de la Syrie. Là était inventée, il y a cinq mille ans, l’écriture sur des tablettes d’argile crue, signes en forme de coin, d’où son nom d’écriture cunéiforme, utilisée jusqu’au tournant de notre ère. L’abondance des textes nous renseigne sur tous les aspects des premières sociétés urbaines dans leur évolution comme de la permanence des rituels religieux à travers les siècles.

 

Cette innovation révolutionnaire – noter pour garder trace – est née au jardin d’Eden entre le Tigre et l’Euphrate, deux des quatre fleuves mythiques de la Bible qui trouve son origine chez les Mésopotamiens (le déluge s’inspire du récit de Gilgamesh, roi mythique d’Uruk). Le tout premier texte, daté de 3 200 av. J.-C., provient précisément d’Uruk, au sud de l’Irak, « cité-Etat, où ont été trouvées 5 000 tablettes d’argile à la fin des années 1920 », note, dans le catalogue de l’exposition, Béatrice André-Salvini, directrice honoraire du département des antiquités orientales. « L’écriture naît avec l’urbanisation, elle permet de sauvegarder et de transmettre les informations dignes de mémoire. » Nombre de ces trésors écrits sont à déchiffrer dans l’exposition grâce aux écrans qui en donnent la tra­duction. Tous les usages de nos sociétés sont déjà là.

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