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Lectures et autres passions...
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9 novembre 2012

Philip Roth / Némésis

La culpabilité qui entraîne le héros du nouveau Ph. Roth dans la solitude et la désespérance. Un jeune moniteur de sport se sent coupable de transmettre la polio à de jeunes enfants et sombre dans le désespoir après avoir lui-même contracté la maladie. Un dialogue de fin génial entre le moniteur et un de ses anciens élèves. Du grand Roth!

critiques:

http://www.lesinrocks.com/2012/10/07/livres/philip-roth-nemesis-sera-mon-dernier-livre-11310126/

http://www.lemonde.fr/livres/article/2012/10/19/les-doubles-je-de-philip-roth_1777288_3260.html

sur Télérama:

C'est a posteriori, lors de la parution aux Etats-Unis de Némésis, en 2010, que Philip Roth a institué dans sa bibliographie une catégorie regroupant quatre romans courts, parmi les derniers qu'il a écrits : Everyman (2006), Indignation (2008), Le Rabaissement (2009) et donc Némésis. Une tétralogie témoignant, expliquait alors le romancier, d'« une séquence de réflexion sur le cataclysme » dans laquelle il s'était engagé — on ne sait où en est aujourd'hui Philip Roth de sa méditation, aucun nouveau roman n'étant venu pour l'heure succéder à Némésis. Anxieux, intense et poignant est l'ensemble romanesque en question, qui atteste que Roth, le génial iconoclaste de Portnoy et son complexe ou du Théâtre de Sabbath, s'est mué au cours des dernières années en un témoin grave et terriblement lucide de la condition humaine — la fragilité, corps et âme, de l'homme, « impuissant face à la force des choses », écrit-il dans Némésis, prêtant à son narrateur cette pensée : « Parfois on a de la chance, et parfois on n'en a pas. Toute biographie tient du hasard [...], de la tyrannie de la contingence. »

Le hasard n'a pas vraiment bien fait les choses, dans le cas d'Eugène Cantor, mais au fond, cela aurait peut-être pu être pire : une mère morte en couches, un escroc de père qu'il n'a pas connu, heureusement un grand-père qui a pris le relais avec droiture et bienveillance : « Il l'encouragea à se défendre en tant qu'homme, à se défendre en tant que Juif, à comprendre qu'on n'en a jamais fini avec les combats qu'on mène, et que, dans la guérilla sans fin dont est faite la vie, "quand il faut payer le prix, on le paye". » L'orphelin de Newark est ainsi devenu un jeune homme de bonne volonté, habité par « le sens aigu de ses responsabilités », professeur d'éducation physique, à son grand dam exempté d'aller faire la guerre en Europe pour cause de myopie. A la place, le voilà chargé de s'occuper des enfants du quartier juif de la ville. Nous sommes en 1944, c'est le début de l'été, et se déclare une épidémie de poliomyélite. A Newark, désormais, on compte les malades et les morts, et la peur incite à chercher au drame des responsables. Sont-ce les Italiens du quartier d'à côté, les chats, les mouches, les hot-dogs du café Syd's... ? Ou est-ce Dieu lui-même — « le grand criminel », l'autre nom du hasard ?

C'est trente ans après les faits, par la voix d'un des enfants du quartier devenu adulte, que Philip Roth raconte la vertigineuse crise morale et spirituelle qu'affronte « Mr Cantor » en cet été 44. Accompagnant son long martyre, la ­réflexion inquiète et fataliste de Roth ouvre toutes grandes les portes de la métaphysique — sans jamais s'éloigner pourtant du terrain trivial où se débattent les hommes au jour le jour, là où règnent la confusion, la douleur, le ­désarroi.

Le 06/10/2012 - Mise à jour le 01/10/2012 à 18h10
Nathalie Crom - Telerama n° 3273

 

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